En général, boire de l’alcool influence notre humeur et la consommation est associée à plusieurs situations émotives; on boit lorsqu’on est triste, on boit lorsqu’on est heureux etc.
Pour la grande majorité d’entre nous, la consommation d’alcool n’a aucune relation directe avec notre état psychologique et ne nous cause pas de difficulté particulière. Cependant, pour les personnes vivant avec un trouble de santé mentale, consommer de l’alcool peut se révéler très problématique. Il existe en effet un lien entre les troubles mentaux et l’abus ou la dépendance à l’alcool.
Rien a priori n’explique pourquoi les personnes vivant avec un trouble de santé mentale sont plus susceptibles d’abus ou de dépendance envers l’alcool. Chaque individu vit une situation qui lui est propre et qui résulte d’une interaction complexe entre des facteurs génétiques, biologiques, personnels et sociaux. Certains experts ont tenté de formuler des théories au sujet de la relation entre la maladie mentale et la consommation d’alcool.
Statistiques
- Les personnes vivants avec un trouble anxieux, un trouble de l’humeur ou un trouble psychotique ou encore ayant vécu un traumatisme, comptent parmi les plus vulnérables.
- Parmi les individus vivant avec un trouble de santé mentale, 15 à 20 % connaissent aussi un problème de toxicomanie. 50 % des personnes ayant un diagnostic d’anxiété généralisée ont aussi un problème de toxicomanie.
- Selon des enquêtes menées aux États-Unis et au Royaume-Uni, le nombre de personnes ayant des problèmes de dépendance à l’alcool est presque deux fois plus élevé chez celles qui ont un problème de santé mentale, que dans la population en général.
- Une enquête canadienne sur la santé a démontré que ceux qui ont souffert d’une dépression majeure dans les douze derniers mois étaient plus susceptibles d’avoir abusé de l’alcool (12,3 %) que le reste de la population (7 %). De même, ces personnes avaient une plus forte propension à connaître une dépendance à l’alcool (5,8 %) que les autres (2,6 %).
- Les Québécois vivant avec un trouble de l’humeur ou un trouble anxieux au cours de leur vie sont trois fois plus susceptibles d’avoir un problème de dépendance à l’alcool que les autres (3,8 %, comparativement à 1,3 %).
- Quant aux Québécois qui disent avoir été anxieux ou déprimés au cours des douze derniers mois, ils ont un risque quatre fois plus élevé d’être dépendants de l’alcool que les autres (6 %, comparativement à 1,5 %).
- Parmi les troubles anxieux, le trouble panique est celui qui est le plus étroitement lié à la dépendance à l’alcool.
- L’abus d’alcool est particulièrement courant chez les personnes qui souffrent d’un trouble de l’impulsivité ou chez celles qui recherchent les sensations fortes.
- Pour les personnes vivant avec un diagnostic de schizophrénie, elles sont trois fois plus à risque que les autres de présenter un problème de consommation d’alcool.
Prédisposition
- Traits de personnalité.
- Facteurs génétiques héréditaires.
- Facteurs sociaux.
- Facteurs environnementaux.
- Un dysfonctionnement de certains circuits cérébraux associés à l’apprentissage serait en jeu autant dans les troubles de l’humeur que dans les troubles de consommation d’alcool.
- Certaines recherches ont démontré que les troubles psychotiques et les problèmes de consommation d’alcool sont liés, car ils ont en commun des gènes ou des anomalies cérébrales.
- Conséquences secondaires d’un stress provenant de perturbations vécues dans l’enfance (négligence parentale, abus etc.) augmenteraient d’autant le risque d’avoir un problème de toxicomanie que le risque de connaître des troubles de l’humeur, des troubles anxieux et certains troubles de la personnalité, surtout de l’impulsivité.
Sensibilité
Les personnes vivant avec un trouble de santé mentale seraient plus sensibles aux effets nocifs des substances psychoactives. Par conséquent, pour une quantité égale d’alcool consommée, ces personnes sont plus vulnérables aux effets intoxicants de l’alcool.
Automédication
Les personnes vivant avec un trouble de santé mentale prennent de l’alcool – une substance aux propriétés apaisantes – pour tenter de régler leurs problèmes. Ce phénomène appelé automédication cherche à expliquer la force du lien qui semble exister entre santé mentale et dépendance à l’alcool.
Bien souvent, afin d’échapper à leur condition pathologique ou atténuer les symptômes de leur maladie les personnes en détresse consomment des substances psychoactives. Ces personnes ne s’automédicamentent donc pas pour pallier un trouble psychologique, mais bien pour pallier une souffrance. Cette tendance est plus forte chez les personnes bipolaires en phase maniaque, ainsi que chez les personnes anxieuses.
- 25 à 35 % des personnes souffrant d’un trouble de l’anxiété généralisée admettent consommer de l’alcool ou des drogues pour atténuer cette anxiété.
- 18,3 % des personnes qui souffrent d’anxiété généralisée, 16,9 % de celles qui ont une phobie sociale et 15,0 % de celles qui ont une phobie particulière consomment de l’alcool pour apaiser leurs symptômes anxieux.
S’il est vrai que la consommation d’alcool procure une gratification immédiate qui pousse à répéter l’expérience, dans les faits, elle est contre-indiquée. Une petite quantité d’alcool peut, à court terme, apporter un soulagement du stress, mais l’alcool ne traite aucunement les causes de ce stress.
À long terme, les personnes qui s’automédicamentent ont besoin de plus grandes quantités d’alcool pour obtenir l’effet recherché C’est ce qu’on appelle la tolérance. L’accoutumance s’installe qui risque de se transformer en dépendance.
Quand l’individu souffre à la fois de troubles de santé mentale et de dépendance à l’alcool, se met en place un cercle vicieux où chacun des deux troubles maintient et même aggrave l’autre.
Aggravation
Lorsque les symptômes précurseurs de la maladie sont associés à la consommation de substances psychoactives comme l’alcool, le risque est plus élevé de développer une maladie mentale. En effet, l’alcool pourrait altérer de nombreux neurotransmetteurs.
Si les problèmes de santé mentale contribuent chez certains à une consommation problématique d’alcool, l’inverse peut aussi se produire : la consommation problématique d’alcool peut contribuer à l’apparition de la maladie mentale chez d’autres.
L’alcool et le sommeil
L’équilibre émotionnel des individus dépend beaucoup de la quantité et de la qualité de leur sommeil. Si le sommeil permet au corps de se régénérer, il permet aussi à l’esprit de se ressourcer. Fatiguée, une personne peut avoir de la difficulté à faire face aux exigences de la vie, ce peut engendrer un stress.
En période de stress, certaine personne peuvent avoir de la difficulté à trouver le sommeil. Pour combattre ce problème, ils peuvent avoir tendance à la consommation. L’alcool peut effectivement aider à s’endormir mais elle peut aussi causer de l’insomnie et des éveils à répétition, augmentant ainsi les troubles du sommeil.
L’alcool et les médicaments
La consommation d’alcool, même sans abus et sans problème de dépendance, peut nuire au rétablissement des personnes vivant avec un trouble de santé mentale. Ceux qui prennent des médicaments et qui consomment simultanément de l’alcool, risquent fort d’oublier de prendre leurs médicaments. De plus, l’alcool peut atténuer l’efficacité de leurs médicaments ou en diminuer l’élimination.
À titre d’exemple, certains antidépresseurs sont utilisés comme sédatifs en période de dépression. Si ces antidépresseurs sont pris en même temps que de l’alcool, les effets secondaires des antidépresseurs peuvent augmenter et être encore plus néfastes en raison des effets négatifs de l’alcool sur le foie.
L’alcool et le suicide
- Neuf personnes sur dix qui se suicident auraient un problème de santé mentale reconnu.
- 25 % des personnes qui se suicident ont un problème de consommation d’alcool et 50 % d’entre elles avaient de l’alcool dans le sang lorsqu’elles sont passées à l’acte.
- Le risque de suicide est 5,5 fois plus élevé chez les personnes qui ont un problème d’abus ou de dépendance à l’alcool que chez les autres.
Source :
Brochure Alcool et santé mentale, Éducalcool, 2011